Chevrefeuilles
CHÈVREFEUILLES
Mais, un sale temps pour mai
Les grillons se prennent
Pour du chèvrefeuille
On mélange tout
Les chèvres et les feuilles
On hurle qu'on a 20 ans, bordel
Qu'on a 1000 ans, maquarel!
Qu'on est mort
Tranquille, tranquille
En paix
Que vous en ayez fini
Avec les soucis, la souffrance
La peur, le manque
Un peu, justifie, safi!
Faire, faire taire le discours mental
Réduit à petit feu au silence
Nouvelles fréquentations, insidieuses
Douleurs dans les mains
Diminutions de la force
La capacité, l'autonomie
Pertes...
Du sommeil aussi, brisé
En morceaux, balloté
Du froid au chaud, vagues
Intense
Je n'aime ni être dépossédée
Ni être possédée
À moins d'être «amoureuse»
Envoûtée, ravie...
Mettre de l'ordre, ranger
Regarde tes murs de pierre
Les yeux au plafond de bois
Écoute les grillons dans la nuit
Loin des villes ta cabane
Cabane au Maroc
Cabane en Jamaïque
Au Cambodge, Casamance,
Chine, Triangle d'or...
Dors, doux coton blotti
La radio ronchonne
L'État qui glisse
Discrètement police
État policier
Petit à petit
L'aigle fait son nid
Pénétrant inquisiteur
Consciences conquises
Âmes envahies, fois éteintes
Libidos bridées faussement débridées
On vous laisse croire qu'on vous laisse penser
Être à votre guise
Tandis que vous êtes déjà devenus
Votre sale auto-censeur
Guerres intérieures
Fouilles à corps à l'école
Gamins en garde à vue
Pendant que l'on nous vole
Nos vies, notre temps, nos souffles
Nos imaginaires, notre nature...
La vie sociale, le quotidien
Leurs empreintes guident nos pas
Nous rattrappent, nous rattachent
Râté le détachement souvent...
Partout, tout le temps
Voyage, voir, regardage
Je ne suis pas ceci ou cela
«Je suis»
Je vois ce qui m'entoure
Qui n'est pas moi
Mais images projetées
Théâtres, aires de jeux, surfaces sensibles
Quels sens que ceux qu'on leur donne
Qu'on s'autorise
Comment être/devenir ce qu'on ne connaît pas
Vocabulaire d'une langue pas toute apprise
Dénicher la confiance, trouvée aux confins
Par dessus, par dessous la peur
Que les mots nous échappent nouvellement
Débrouiller les pistes à l'instinct, l'instant
S'arrêter là devant
Feuilles vierges et crayon glissant
Se poser, geste, posture, silence
Qu'adviennent les mots que pourra
Entre eux surgissent des questions
Prospectives...
Où irai-je l'hiver prochain
Quel pays futur voyage...
Le chèvrefeuille est enfin en fleurs
Enivrant, vacillement
Ce parfum comme
Celui du jasmin de l'Atlas
À fondre amoureux
Un baiser qui vous cueille
Le corps vous lâche
Ne pèse rien
S'envole dans l'éther
Ou coule dans la terre
Fondu, effusion
Quel pays?
Mexique, Yémen, Laos, Turquie,
Algérie, Samarkand,
Maroc, Jamaïque, Inde...
Trouver un fil
Chercher une recherche, quête
Une inspiration, un regard, guide...
Peint sur le motif
C'est un paysage
Que l'on doit traverser
Par la marche
Un temps nous sépare de l'horizon
Nous allons d'un monde à l'autre
Nous passerons le voyage
Vers le lent demain
Si vite arrivé
Devenu tellement léger
Qu'il ne se sent plus respirer
Le soleil se couche
La lune est là
Moi aussi
Elle ne compte pas le temps
Premier croissant brillant
Les avions aussi filent blanc
Dans l'orange, le mauve
Le gris, brumes violentes
Tableau mouvant
Le soleil a disparu
Le coucou chante
Je tremble
Espérément attirée
Par un abri, une chaleur
Manque, gi'me shelter
Dans les bras des mots
Des livres
Des silences sidérants
Retraite
Dos au mur
Ambivalence du désir
Et du refus
Lucide subjectif
Suis-je objet ou sujet?
Non-lieu pour la question
Don't forget
Je ne suis ni ceci, ni cela
«Je suis»
Rêve au soleil
J'abandonne
Seul le ciel noir
Menace
Imperceptiblement
Se déplacent
Les nuageux fantômes
Qui chassent en ces temps
Les songes au Prince Charmant
Je ne devrais être ni ici, ni là-bas
Ni ailleurs
C'est l'heure orange
Retrouvailles bercées de mauves
Le soleil se couche
Doucement
Reste du rose flottant sur les collines
Le noyer grandit
Petit à petit brandit ses branches
À la ronde
Me les tend pour compagnie
Jusqu'où irons-nous de paire
Jusqu'à quand?...
Soleil, temps pour juin
«Je cherche l'or du temps»
Dit le Breton poète, cimetière des Batignolles
«Agir en primitif et prévoir en stratège
Je n'écrirai pas de poème d'acquiescement»
Dit le René Char
«Précipités merveilleux du désir»
Encore faut-il s'y tenir prêts
La voix, les yeux du passant
Aigrettes rouges
Souffles cendrés
Lignes de fuite
Dans l'instant
Instant de naissance
Instant de mort
Libre du temps
Happax sensationnel
Ascension vers soi-même
Aux sommets vierges
Attentionné par devers son être
Chair et sang vont pourrir
S'accepter matière
Animal à transformer
Matière et énergie
Nécrophage, anthropophage
Amorphage
La même dame promène
Le même chien
Au même endroit
Jusqu'à quand
Tous ces étrangers que nous sommes
Et restons les uns pour les autres
Quand bien même
Nous nous précipitons
En frottements et étincelles
Peau contre peau
Visage contre visage
Poussières d'étoiles
Comment se suffire à soi-même
Se souffrir
Ne pas oublier de laisser
Des lignes vierges
Pour les repentis du peintre
Les silences, les fautes
Les remords, les vides
Les manques, les trous noirs
Et de mémoire
Les souvenirs sous-entendus
Les espaces nus
Terra Incognita
Laisser de l'air
La place, l'ouvert
Par la porte béante
Est entrée l'hirondelle
Affolée assommée au carreau
Le chat-sauvage- l'a croquée
Pas les ailes
L'avion est tombé dans la mer
La lune brille
Insolente de beauté
Sa geste bande
Tourne 7 fois
Ses mots sur ma langue
Qu'est-ce que je voulais dire?
Corps tout doux
Noire colombe
Marcher, éviter, léviter
Le temps de se remettre sur pieds
Poitrine offerte
Son odeur nue
À la fin reconnue
Si tu n'as pas sage
Laisse venir la route
Oublie qui te traverse
C'est là sans toi, ni lieu
Éternelle jeunesse
Nous vient, nous échappe
Membre à part
Corps multiple
Cellule en rappel
Noyée dans la terre
Perchée à l'abrupt
Des falaises
Cordon
Corps tout doux
Spirale arrimée
Matière mouvementée
Qui fait le repos
Fabrique la pulsion
Sous le vent
Tout doux tourment
Mots m'em-barquent
Larguez les a-je me-marres
L'amour fol
Quelle traversée
Mon âme-mour
L'hôte-toi de mon soleil
Laisse couler sunshine
L'eau porte voix
Voilà à la face du monde
Ici ne s'achètent
Ni voix, ni silences
N'y vois aucun scrupule
La saveur des amant
Leur faveur, ruissèlements
Fleuves
Fameux élans
Instincts de mort et de sexe
Conversations, conservations
«Mais il s'agissait de pouvoir recommencer à aimer,
non plus seulement de continuer à vivre»
Conviés au festin de Pierre
Au Banquet de Platon
Quel bon vent vous amène
Nous emporte
Frissons victorieux
Nous hantent les lendemains
Pucelle de la veille
Vieille rebelle
Chirurgie éthique
Mes consoeurs de coeur
Concerts de nos ardeurs
They come
Baby
Lonesome cow-boy
Entre les cuisses des prairies
Où penche l'héliotrope
Redressée par Van Gogh
Il a couché avec elle
Il a joui dans son soleil
Jeté dans sa lumière
Lait de poussière d'étoiles
Vie nécessaire à elle-même
In-errante à la rencontre
Mercenaires
Quelle allure aura la nuit
Ses sandales de moine
Semelles de soufre
Aux airs de chant
Des mois en chocolat
Des années en lumière
Toxique affaire
Ferrailles aquatiques
Grincements des os
Zoo familier
Hey l'hirondelle
Tu dandines de travers
Tu devineras peut-être
Peut-être pas
Apparement la sagesse
S'alignait au volcan
Ses laves savantes
J'avais envie de mordre au travers
Arracher la saveur
À pleines dents
Demander la faveur
Dire merci
Et prendre le doute
Tracer la route
C'était décidé
Je ne savais plus rien
Tant que le noyer
Abritait mes frasques
Et frustres fringues
Fallait faire un effort
Pour fouiller la re-garde robe...
Agite les sangs, les sueurs
À l'approche du désastre
Imminent
On bande et
On lève le camp
Le vent d'autan
A séché nos langues
Avec la terre
L'arbre échevelé
Balladé par le vent
S'est figé dans le calme
Avant la tempête
Qui bourdonne
Coups de petits vents attardés
Vite, le soleil n'est plus
Qu'une ligne orange incandescente
Posé sur la ligne noire d'horizon
Allongé, il prend son temps pour disparaître
Sous ses dernières lueurs
Je deviendrai aveugle
Guidée par le dernier reflet
De la page blanche
Lueur d'espoir visionnaire
Pour mémoires dans le noir...
La parade ira t-elle jusqu'en paradis
Ses cohortes de démons jolis
Anges pacificateurs
Éleveurs d'âmes à armes égales
Cigales chantantes aux quatre saisons
Quatre chansons haletantes
On le tente
Le temps n'a plus lieu d'être
On entraîne les chapitres
Déchaine les lithurgies
Les lits turgescents
Grimpent aux rideaux
Du théâtre ambulant
Lentement l'envers du décor
Dévoile des somptuosités
Parfums affleurant les ondes
Caracolent à la peau
C'est encore l'aube de nos humanités
Petit à petits d'hommes
Qui parle de raison d'être?
Nous ne sommes pas ce que nous voyons
Nous sommes le bois, le fer
Qui craque et qui sent bon
Nous sommes l'écharde
Qui dit attention
Nous sommes le veine et l'écorce
L'orange et le rouge
S'attarde gaiement, croque sous la dent
Nous sommes aux confins comme au centre
Confits, sucrés à la bonne nouvellle
Nous ne possédons rien
Rien ne nous possède
Sous le charme nous frayons
Frôlant l'expansion
Vagues, ondulamente, vagues
Vogue bébé planète
Chevauche échevelé
La manège salé
La fraîcheur bruisselante
Froide dans le bas du dos
Tanguent les toiles, les chemises
Les chapiteaux de paille
Les tentes de ferraillle
Destins faits à la main
Soudée la sueur
Fondue la pâleur
Sortie de soi
Tenues de pirates acceptées
Au gué les gars
Vire aux carlos
Focus en mono
Là y fait beau
Mais beau !
L'après-midi du faune
Qui se savait lézard
Rocher en amazone
Il n'est jamais trop tard
J'avance, et je suis nue
Il serait Blue Montain
Ou col de Bavela
Torrents en cascades
Échappés du combat
Translucides parades
Sacrées libellules bleues
Ambre, opale
Membre pâle
Trémière la rose
Guerrière, la pause
J'ose les fesses calypiges
Le derrière de la chose
À rebrousse étoiles
Débrousse voiles
Tombés un à un
Aux batailles
Humbles canailles
Triomphantes
Le temps de l'éclair
«La vie passe, rapide caravane
Arrête ton chameau
Et pense à être heureux»
De vous à moi
De nous à nous
Dénoue les noeuds
Les voeux, les pieux
Montent les totems
Les mâts, les baptêmes
Égaux en tous lieux
L'ego c'est trop peu
Trompeur torpeur
Trop de peur
T'as rien vu, tu meurs
T'en peux plus
Avant même d'être parti
l'assomoir, le bavoir
Le bas-ventre, on se vante
On se vautre côte à côte
Rien de grave
Porte les semences
Duveteuses, blanches
Les papillons vont pareil
Vont de même
Vous je t'aime, vous je t'aime...
Page précédente: Quelle affaire
Page suivante: À Fondouk